mardi 25 septembre 2007

Ecrivain, doux paradoxe...



Depuis une quinzaine de jours, j'ai un objectif et une certitude : je vais sortir mon premier livre. Ne me demandez pas quand, ni comment, mais je vais le faire. J'en ai l'envie. Forte, ancrée. Pas de ces petites envies qui virevoltent au gré des humeurs. Un paradoxe quand on sait que je peux passer de longues semaines sans écrire. Ou sans terminer mes nouvelles. Mais ce n'est pas parce que l'on n'est pas productif que l'écriture ne vous secoue pas en permanence de l'intérieur.

Une certitude donc. Je veux franchir ce palier et je vais y arriver. Pour le reste, c'est un peu flou. Je songe déjà à la préface. Pour le contenu, j'ai envie d'alterner les genres, entre nouvelles, exercices de style et tranches de vie. Finalement, dans mon idée, je me verrais bien coucher une partie de mon blog sur papier. Présenter certains écrits comme Piccolo, en respectant certes l'ordre chronologique, mais en y intercalant d'autres choses, un peu comme je le fais ici. Avec de courts chapitres plus autobiographiques. Enfin, je sais pas trop...

Je dois remercier le jeune écrivain de 18 ans que j'ai interviewé il y a quelque temps déjà. Non pas qu'il m'ait aidé ou que je lui ait demandé quoi que ce soit. Mais avoir vu, puis lu, son premier ouvrage a répondu à certaines questions enfouies en moi comme autant de freins. Déjà, son livre est court, une soixantaine de pages... Je n'ai donc pas besoin de pondre un pavé. Mais c'est surtout le découpage de son livre qui est comme une révélation. Simple mais je n'y avais jamais pensé sous cet angle. Il est divisé en anecdotes, ce qui lui permet de parler de sa vie ou du regard qu'il porte sur le monde qui l'entoure sans subir les contraintes d'un roman par exemple.
Il écrit deux, trois pages sur un thème qu'il veut partager avec le lecteur, puis passe à un autre et ainsi de suite.

Du coup, ça m'ôte une sacrée épine du pied. Car, comme tout écrivain, je suis quand même obligé de me purger de certains pans de ma vie qui m'angoissent ou qui ont pu me meurtrir. Avec cette envie de les coucher sur papier tout en me disant : "Tu ne feras jamais une histoire de 150 pages avec ça". Je n'ai jamais pensé ne pas faire une histoire mais au contraire plusieurs.
Tout au plus ai-je eu vaguement l'idée d'un recueil de nouvelles...

Mais en fait, je peux aller bien au delà, mélanger les genres, entrecouper la fiction de mes nouvelles d'anecdotes plus intimistes qui composeront autant de chapitres supplémentaires. J'ai envie de ce joyeux bordel qui aura quand même sa cohérence : les anecdotes sur ma vie ne seront finalement que le prolongement d'un processus qui permettra au lecteur de mieux comprendre mes écrits.

Bref, je suis excité. Et je vais foncer. Peu importe que je ne sois peut-être pas "au top" d'un point de vue littéraire. Je préfère le brut et l'authentique à une construction trop rigide, trop codifiée.



Je me demande si je ne tiens pas là une bonne partie de ma préface...

lundi 24 septembre 2007

Nath, au sommet de l'Everest



Il y a quelques mois, Nath aurait pu sombrer. Elle aurait pu se briser sur les écueils laissés ci et là par son patron et ne pas s'en relever. Elle aurait pu, comme moi en 2001, se battre contre le vent et y laisser un bout d'âme. Pour finalement rompre.

Sauf que Nath a plié mais n'a pas rompu. Passé le temps des larmes, elle est repartie de l'avant. Malgré le harcèlement moral parce que je persiste à dire qu'il n'y a pas d'autre mot pour qualifier le comportement de son patron qui a outrepassé ses droits en lui mettant une épée de Damoclès au dessus de la tête, voire même tout contre la gorge.

Pendant ces quelques mois d'incertitude, j'ai ruminé ma rancoeur née d'expériences malheureuses. On aurait voulu m'atteindre directement que ça ne m'aurait pas fait plus de mal. J'étais prêt à me battre. Et à aller loin.

Pendant ce temps, Nath se battait aussi. Avec courage et surtout, sans jamais se laisser abattre, sans jamais cesser d'y croire. Avec intelligence également. Elle aurait pu se laisser envahir par une forme de haine qui aurait pu fausser son jugement. Et finir de discréditer son travail. Fort heureusement, elle ne me ressemble pas. Nath est incapable de noirceur, de méchanceté. Durant ces semaines où le stress ne l'aura pas épargnée, elle n'a eu qu'une seule ligne de conduite : aller de l'avant, prouver sa valeur, apprendre encore et encore... Bref, faire mentir tous ceux qui ne la croyaient pas capable.

Alors ce soir, je suis fier. Parce que Nath s'est faite toute seule. Bien sûr, il y a l'environnement familial, les amis, les soutiens... Mais une fois dans l'arène, on est seul. Et elle a définitivement montré qu'elle avait toute sa place au sein de cette entreprise. Elle en ressort donc grandie, probablement à ses propres yeux, mais sûrement aussi aux yeux de ceux qui la côtoient de près comme de loin. Tout ce qu'elle a acquis, elle ne le doit qu'à elle seule, à son abnégation, à la confiance en son jugement, aux défis qu'elle s'était promis de relever.

Alors oui, je ne suis pas forcément objectif mais peu importe. C'est mon blog après tout et s'il ne contient pas de vérités, il contient ma vérité. Celle qui me fait avancer avec Nath depuis quelque temps déjà. Et qui me fait découvrir chaque jour un peu plus que, sous la femme douce et pacifiste, il y a aussi quelqu'un qui sait ce qu'elle veut et, peut-être plus important encore, ce qu'elle ne veut pas.


Elle a tracé sa voie. Je n'ai plus qu'à lui emboîter le pas et trouver mon propre chemin.

samedi 22 septembre 2007

Piccolo 9eme partie




Tu vas me rapporter ces deux bestioles immédiatement !

Manon fronça les sourcils, serrant un peu plus les deux furets contre elle. Eddy avait articulé chacun de ses mots, particulièrement le dernier, ce qui, en principe, ne laissait aucune place au dialogue. Voyant le visage virant au rouge de son père, Manon jeta un regard vers sa mère mais Blanche évita de croiser le sien, mi-amusée, mi-embarrassée. Martin semblait intéressé par les deux furets, mais n’était pas fâché non plus de voir sa sœur dans cette situation, comme en témoignait le rictus mauvais qu’il affichait bêtement.

Il y en avait un par contre qui ne perdait pas une miette du spectacle, c’était le chat Neptune qui agitait nerveusement la queue, visiblement prêt à bondir à la moindre occasion et à ne faire qu’une bouchée des deux furets.
-N’y pense même pas, toi, siffla Manon en lui jetant un regard noir. Le chat émit une sorte de miaulement plaintif mais ne bougea pas, ses prunelles toujours fixées sur ses proies potentielles.
-Mais papa, supplia Manon, c’est pour le cirque… C’est un cadeau de Piccolo… Tu sais qu’il a un bouquetin et un lama depuis hier ?
La fillette tentait maladroitement de mettre son père dans sa poche. Autant dire que la partie était loin d’être gagnée.
-Piccolo par ci, Piccolo par là, ça commence à suffire jeune fille ! Nous avons consenti à certains efforts à la condition que tes notes remontent, et je dois bien reconnaître que ça se passe plutôt bien jusqu’à présent. Mais faudrait voir à ne pas pousser !

Eddy avait levé la voix en prononçant la dernière phrase. La discussion pouvait sembler close mais Manon était bien décidée à tenter crânement sa chance. Elle fixa son père qui ne décolérait pas puis se tourna subitement vers Blanche.
-Maman, je demande à ce qu’il y ait un vote.
-Quoi ? s’étrangla Eddy. Un vote ? Non mais dites mois que je rêve ! Il n’y a rien à voter. C’est non, point final. Non mais, qui commande dans cette maison ? Je ne veux pas de ces deux animaux qu’il faut nourrir et qui ne manqueront pas de faire des dégâts dès qu’ils seront hors de leur cage. On a déjà un chat alors ça suffit. Manon, va ramener tes deux bestioles et tout de suite.

Manon sentait qu’elle était au bord de la rupture et que les larmes n’étaient pas loin. Mais elle n’était pas du genre, contrairement à son frère, à pleurnicher pour obtenir ce qu’elle désirait. Elle ne quitta pas son père du regard, tout en s’adressant à sa mère :
-Maman, on a toujours fait comme ça entre nous. Nous avons toujours discuté des problèmes ensemble, avec un vote pour que tout le monde puisse exprimer son point de vue. Quand on crée des règles, on ne peut pas s’y tenir un jour et y renoncer le lendemain.
Eddy, écarlate, était éberlué par le toupet de sa fille, tout en ne sachant pas que répondre. Blanche avait pris subitement quelques couleurs et hésitait sur la marche à suivre. Sa fille n’avait pas totalement tort.
-Ecoute, chéri… faisons un vote, si elle y tient… Après tout, c’est une décision importante pour elle.
Eddy eut un rire mauvais.
-Le jour où j’ai instauré ce système, j’aurais mieux fait de rester couché. Mais puisque vous semblez tous d’accord, eh bien, passons au vote. Pour ce que ça changera, de toute façon, rajouta t-il à l’attention de Manon, ce qui eut pour effet de lui faire serrer les deux furets un peu plus contre sa poitrine.

Un peu trop visiblement. L’un des furets couina et mordit Manon à la main pour se libérer. La fillette cria, desserrant son étreinte. Les deux petites bêtes sautèrent alors à terre tandis que Neptune laissait échapper un feulement en se lançant à leur poursuite.
Heureusement, la porte d’entrée était fermée. Les furets ne risqueraient donc pas de s’échapper. Pour le reste, c’était une vraie bérézina ! Les furets grimpèrent sur le buffet, le canapé, la table, courant de pièce en pièce, se dissimulant sous des meubles avant d’en sortir tout aussi rapidement, toujours suivis par Neptune, lui même coursé par Manon.
-Saleté de chat, si tu les touches, je te tue, hurla la fillette qui ne sentait même pas la douleur de sa main meurtrie.
Mais Neptune n’en avait cure. Il continuait sa poursuite, sautant, courant, feulant, toutes griffes dehors. Il n’était d’ailleurs pas loin de les attraper lorsqu’il se sentit soulevé de terre par une main puissante.
-Toi, tu vas me faire le plaisir d’aller voir dehors si j’y suis !
Le chat tenta de se débattre, faisant de grands moulinets avec ses pattes et crachant copieusement mais Eddy avait une poigne solide. Il s’assura que les furets ne soient pas à proximité puis il ouvrit la fenêtre et balança le chat dehors. Il entendit un « Miaoooowwwwww » de protestation lorsqu’il la referma.
-Voilà une bonne chose de faite. Manon, habille toi, maman va t’emmener chez le docteur… Ah bravo, on s’en rappellera du cadeau de Piccolo ! Allez, file !

Manon était toute penaude et, à présent que la pression était retombée, sa main la faisait souffrir. Heureusement que ses vaccinations étaient à jour. Elle regarda sa mère, l’air inquiet, en pensant aux deux furets planqués quelque part dans la maison.
-Il n’y a rien à faire pour l’instant Manon. Ils doivent se calmer. Ton père essaiera de les retrouver un peu plus tard et de les remettre dans leur cage respective. Mets ton manteau, le docteur doit encore être à son cabinet.
Manon obtempéra et regarda son père. Celui-ci avait la mine des mauvais jours. La fillette se dit alors que le vote était loin d’être gagné. Elle se demandait même s’il aurait lieu. Surtout lorsqu’elle vit une dernière fois le visage fermé de son père, avant de franchir puis de refermer la porte de la maison.


A suivre….

vendredi 21 septembre 2007

Piccolo chapitre 8




Résumé : Piccolo, ancien clown propriétaire d’un troquet dans un petit village, s’est pris d’amitié pour Manon, une fillette solitaire qui voue au vieil homme une admiration sans borne. La gamine étant en situation d’échec scolaire, notamment en français, Piccolo lui propose un marché : lui apprendre l’art du cirque et monter un vrai spectacle à condition que ses notes remontent. Enthousiaste et soutenue par ses parents, Manon accepte. Tout semble bien se passer jusqu’au jour où Paulo, un ami du vieux clown, suggère à Piccolo de tout arrêter, estimant que le cirque n’est pas un métier d’avenir et que son amitié pour Manon fausse son jugement.
Ebranlé, le vieil homme ne sait plus que faire. Doit-il continuer ou au contraire s’effacer progressivement ?






La journée n’avait pas dissipé les doutes de Piccolo, bien au contraire. Il était resté une bonne partie de l’après-midi, seul, à grommeler derrière son comptoir. Les mots de son ami Paulo allaient et venaient sans arrêt dans sa pauvre tête. Manon allait arriver mais, pour la première fois, il n’était pas enthousiaste à l’idée de la retrouver. Pour peu qu’elle ait des devoirs de français et ce serait le bouquet, pensa t-il en esquissant un pâle sourire.
Il avait mis sa matinée à profit pour aménager des enclos dans son jardin, à l’arrière du bar, pour le bouquetin et le lama. Quant aux furets, Piccolo avait pour le moment déposé les cages derrière le comptoir.

Il ne pouvait s’empêcher de penser que ça ferait bien ses affaires si Manon pouvait avoir un cours de soutien ce soir. Il jeta un œil sur le calendrier et soupira. Il devait absolument réussir à faire abstraction des propos tenus la veille par Paulo. C’est vrai, ça : de quoi se mêlait-il ? Qui lui avait demandé son avis d’abord ? Piccolo fronça les sourcil et essuya un verre avec tant de vigueur qu’il se brisa. La main de Piccolo se mit à saigner, malgré le torchon. Il pesta entre ses dents et c’est précisément le moment que choisit Manon pour faire son entrée.
Piccolo disparut précipitamment dans la cuisine, le torchon enveloppant sa main ensanglantée.
-J’arrive, Princesse ! Pose tes affaires, le goûter arrive !
Il se lava abondamment la main au robinet, mit un peu d’eau oxygénée sur la plaie puis enroula de la gaze autour de sa paume droite. Il sortit de la pièce tout sourire, pensant pouvoir donner le change, mais comme de bien entendu, c’est sa main bandée qui attira tout de suite le regard de la fillette.
-Ce n’est rien du tout, anticipa Piccolo tandis que Manon fronçait les sourcils. Une petite maladresse, rien de plus. Allez, assied-toi. Tu dois avoir des devoirs et ensuite, si tu es sage, j’aurai quelque chose à te montrer.

La part de tarte aux myrtilles parut fade à Manon. Elle n’avait pas oublié le regard un peu vide de son ami ce matin, lorsqu’elle l’avait salué en se rendant à l’école. Et maintenant, ce bandage. Et puis, il y avait autre chose, qu’elle n’aurait pas su définir. Une distance, peut-être… Piccolo était plus silencieux que d’ordinaire. Souriant mais silencieux.
Elle but son verre de sirop de cassis qui lui sembla aussi manquer de saveur puis elle sortit ses affaires de classe. Elle ne souhaitait pas poser de question. Après tout, peut-être se faisait-elle simplement des idées. Son vieil ami pouvait tout aussi bien être simplement fatigué.
Piccolo scruta le visage de la jeune fille. Elle essayait de ne rien laisser paraître mais il voyait bien qu’elle était contrariée. D’ailleurs, elle n’avait pas témoigné d’intérêt particulier lorsqu’il avait dit avoir quelque chose à lui montrer. En temps normal, elle aurait été intenable.

Alors il prit sa main dans la sienne et lui sourit. Manon redressa la tête et offrit un sourire radieux à son ami Piccolo. L’instant n’avait rien de particulier, un sourire parmi tant d’autres échangés et pourtant Manon sentit les larmes lui monter aux yeux sans qu’elle puisse contrôler quoi que ce soit. Elle se leva et éclata en sanglot sur l’épaule du vieil homme. Il restèrent comme cela un petit moment, sans rien dire. Piccolo pensa que, décidément, cette gamine n’était pas comme les autres. Il se demanda même s’il ne serait pas plus simple de lui parler de son entretien de la veille avec Paulo, en toute honnêteté. Après tout, Manon et lui étaient de vrais amis et cette relation était pour beaucoup basée sur une confiance mutuelle.
Mais une partie de lui se disait que finalement, tout ça n’était pas bien important. Et puis, c’était tout de même une discussion d’adulte et Manon restait une enfant. Mature et apte à comprendre plein de choses, mais une enfant quand même.

Lorsque Manon, les yeux rougis mais toujours souriante, retourna s’asseoir, Piccolo se sentit le cœur infiniment plus léger. Ils allaient continuer, travailler de plus belle. Peu importe le temps que ça durerait. Peu importe aussi qu’elle en fasse ou non son métier. Seul le moment présent comptait. Faire simplement un bout de chemin à deux.
Manon aussi se sentait mieux. D’ailleurs, elle demanda une autre part de tarte, et cette fois, jamais les myrtilles ne lui avaient semblé aussi bonnes. Même les devoirs de français, dictée et conjugaison, lui semblèrent agréables. Et lorsqu’elle eut fini, elle lança à Piccolo un regard plein de malice.

-Alors c’est quoi la surprise que tu voulais me montrer ?



A suivre…