Je fermai le coffre de la voiture, levai la tête et vis une voûte constellée de milliers d’étoiles. Je ne me rappelais pas en avoir déjà vu autant, même lorsque enfant, étendu dans les herbes, je passais mes nuits estivales à les regarder briller.
J’eus un petit pincement au cœur. Plus que d’avoir vu ces lueurs dans le ciel, c’était surtout cette mélancolie s’insinuant en moi qui me surprenait. J’étais encore capable de ressentir. Une aptitude fugace à capter encore de petits instants d’émotion. Ma vie n’était peut-être pas seulement faite de vide. Il y avait aussi quelques étoiles à l’intérieur. De petites étoiles dont je devais coûte que coûte préserver la lumière. Sinon…
J’avais déjà laissé filer une étoile. La plus éclatante de toutes avait glissé entre mes doigts. Non. C’est moi qui lui avait rendu sa liberté. Je ne voulais pas que cette si belle étoile, si lumineuse, puisse perdre de son éclat à mon contact. Je me demandai si elle était heureuse là où elle était à présent. Je le souhaitais, tout en sachant que rien n’est jamais aussi simple.
J’étais bizarre ce soir. Tout était silencieux. L’automne était là, avec ses nuits précoces et fraîches. J’observai le relief rocheux. Il fit place progressivement à un champ d’herbes et de fleurs, celui de mon enfance qui se trouvait à l’arrière de la maison familiale. Je m’y voyais allongé sur le ventre, un brin de foin dans ma main, à l’affût du grillon qui ne manquerait pas de sortir. Alors, l’enfant que j’étais, l’aurait précautionneusement pris entre ses deux mains et serait rentré chez lui, ému de son butin, et aurait déposé, comme à son habitude, l’insecte chantant sur une biscotte.
Mais ce soir, les grillons ne chantaient pas. Ils ne chanteraient plus jusqu’au printemps ou l’été prochain probablement. Mais j’aurais pu aisément les entendre. Il m’aurait juste suffit de fermer les yeux.
J’avais donc laissé Gwen. Cela faisait déjà plus de trois mois. Je l’avais laissée par amour, pour ne pas la faire sombrer avec moi. J’avais aussi un peu de peine pour Peter. Lui aussi, je l’avais trompé. J’avais trahi sa confiance. Mais lui avais-je vraiment menti au fond ? Je lui avais dit vouloir partir. Je n’avais pas précisé comment.
Je ne me supportais plus, et je supportais les autres encore moins. J’avais eu le choix entre la mort et la renaissance. Peut-être que l’un m’aurait apporté l’autre, qui sait ? Mais je n’avais pas voulu tenter le diable. La renaissance m’allait très bien. Ainsi que l’isolement qui allait avec.
J’avais donc mis sur pied ma propre mort. Mon ancienne vie s’était éteinte en même temps que j’avais enfoui le pendentif dans le sable. Je savais que Peter ne se poserait pas de question. C’était mon meilleur ami. Un frère. Mais même lui n’aurait rien pu pour moi.
Aujourd’hui, il me croyait probablement reposant au fond de l’eau, parmi les poissons et autres sirènes. Et c’était mieux ainsi.
J’amenai les courses à l’intérieur de la maisonnée. Personne ne me trouverait jamais ici. Un coin reculé, en pleine campagne corse. Et puis qui chercherait un mort de toute façon ? En plus, pas de voisins à moins de trois kilomètres à la ronde. Et pas du genre à poser des questions de toute façon. Ils avaient compris que je cherchais la tranquillité et la discrétion. Ils respectaient ça. Je pense même que ça leur convenait tout à fait. Ca les changeait de tous les badauds de la métropole. Quoique ici, les touristes, même en pleine saison, ça ne devait pas courir les rues.
J’étais bien. Un peu mélancolique ce soir mais ça ne durerait pas. Cette nouvelle vie, je l’avais tellement désirée sans oser y croire. Mon passé était derrière moi. Ainsi que tous ceux qui en avaient fait partie. Peter et Gwen hantaient parfois certains de mes rêves mais je n’étais pas inquiet. Je n’avais aucun regret. J’avais fait ce qu’il fallait.
J’esquissai un sourire. La vie était si belle.
A suivre…
J’eus un petit pincement au cœur. Plus que d’avoir vu ces lueurs dans le ciel, c’était surtout cette mélancolie s’insinuant en moi qui me surprenait. J’étais encore capable de ressentir. Une aptitude fugace à capter encore de petits instants d’émotion. Ma vie n’était peut-être pas seulement faite de vide. Il y avait aussi quelques étoiles à l’intérieur. De petites étoiles dont je devais coûte que coûte préserver la lumière. Sinon…
J’avais déjà laissé filer une étoile. La plus éclatante de toutes avait glissé entre mes doigts. Non. C’est moi qui lui avait rendu sa liberté. Je ne voulais pas que cette si belle étoile, si lumineuse, puisse perdre de son éclat à mon contact. Je me demandai si elle était heureuse là où elle était à présent. Je le souhaitais, tout en sachant que rien n’est jamais aussi simple.
J’étais bizarre ce soir. Tout était silencieux. L’automne était là, avec ses nuits précoces et fraîches. J’observai le relief rocheux. Il fit place progressivement à un champ d’herbes et de fleurs, celui de mon enfance qui se trouvait à l’arrière de la maison familiale. Je m’y voyais allongé sur le ventre, un brin de foin dans ma main, à l’affût du grillon qui ne manquerait pas de sortir. Alors, l’enfant que j’étais, l’aurait précautionneusement pris entre ses deux mains et serait rentré chez lui, ému de son butin, et aurait déposé, comme à son habitude, l’insecte chantant sur une biscotte.
Mais ce soir, les grillons ne chantaient pas. Ils ne chanteraient plus jusqu’au printemps ou l’été prochain probablement. Mais j’aurais pu aisément les entendre. Il m’aurait juste suffit de fermer les yeux.
J’avais donc laissé Gwen. Cela faisait déjà plus de trois mois. Je l’avais laissée par amour, pour ne pas la faire sombrer avec moi. J’avais aussi un peu de peine pour Peter. Lui aussi, je l’avais trompé. J’avais trahi sa confiance. Mais lui avais-je vraiment menti au fond ? Je lui avais dit vouloir partir. Je n’avais pas précisé comment.
Je ne me supportais plus, et je supportais les autres encore moins. J’avais eu le choix entre la mort et la renaissance. Peut-être que l’un m’aurait apporté l’autre, qui sait ? Mais je n’avais pas voulu tenter le diable. La renaissance m’allait très bien. Ainsi que l’isolement qui allait avec.
J’avais donc mis sur pied ma propre mort. Mon ancienne vie s’était éteinte en même temps que j’avais enfoui le pendentif dans le sable. Je savais que Peter ne se poserait pas de question. C’était mon meilleur ami. Un frère. Mais même lui n’aurait rien pu pour moi.
Aujourd’hui, il me croyait probablement reposant au fond de l’eau, parmi les poissons et autres sirènes. Et c’était mieux ainsi.
J’amenai les courses à l’intérieur de la maisonnée. Personne ne me trouverait jamais ici. Un coin reculé, en pleine campagne corse. Et puis qui chercherait un mort de toute façon ? En plus, pas de voisins à moins de trois kilomètres à la ronde. Et pas du genre à poser des questions de toute façon. Ils avaient compris que je cherchais la tranquillité et la discrétion. Ils respectaient ça. Je pense même que ça leur convenait tout à fait. Ca les changeait de tous les badauds de la métropole. Quoique ici, les touristes, même en pleine saison, ça ne devait pas courir les rues.
J’étais bien. Un peu mélancolique ce soir mais ça ne durerait pas. Cette nouvelle vie, je l’avais tellement désirée sans oser y croire. Mon passé était derrière moi. Ainsi que tous ceux qui en avaient fait partie. Peter et Gwen hantaient parfois certains de mes rêves mais je n’étais pas inquiet. Je n’avais aucun regret. J’avais fait ce qu’il fallait.
J’esquissai un sourire. La vie était si belle.
A suivre…
3 commentaires:
Alors là, si je m'attendais !... Changement d'ambiance à chaque tournant, c'est toujours la belle écriture que l'on connait, mais qu'est-ce qu'elle nous balade !! Pas grave, j'aime autant ça, je n'aime pas les histoires trop noires : merci Franck ! Bon, cela n'augure rien du reste, OK, parce qu'avec un titre pareil... à moins qu'il ne soit plus approprié, vu où l'histoire te mène ?!!
Je suis assez content de ce revirement... que je n'avais pas prévu, comme à mon habitude...
Alors est-ce que le titre est encore valable ? C'est bien la question que je me pose... Wait and see...
Merci Cath !
Effectivement, changement d'ambiance ! Et l'important, c'est que ça avance, que ça se construit… Rien que pour ça, c'est beau !
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